Les syndicats patronaux en France : tour d’horizon d’un secteur particulier
On compte en France aujourd’hui plus de 5 300 syndicats professionnels différents. Ces syndicats peuvent disposer de structures locales implantées dans toute la France et représentent l’ensemble des différentes branches d’activité et corps de métiers de l’hexagone.
Si le rôle des syndicats de salariés est plutôt bien connu du grand public, les objectifs, l’organisation et le fonctionnement du syndicalisme patronal l’est moins : défendre les intérêts de leurs membres, représenter et promouvoir le secteur d’activité, exercer des mandats dans différents organismes paritaires, engager le dialogue social avec les salariés. Telles sont les missions d’une organisation patronale tant sur un plan national que sur un volet local.
Depuis 2008, le cadre réglementaire qui leur est imposé est profondément modifié : quel est le poids politique représenté par ces entités ? Quelles sont leurs ressources ? Pour répondre à ces questions, le législateur a établi des règles relatives à la transparence financière et à l’évaluation de la représentativité patronale.
Les syndicats connaissent désormais leur influence au sein de la branche d’activité concernée mais aussi celle de ses concurrents. Les subventions perçues par le syndicat sur le plan national étant corrélées à cette représentativité, les syndicats vont devoir revoir leur stratégie pour conserver leurs adhérents et en convaincre de nouveaux.
L’enquête présentée a été réalisée auprès de plus de 200 syndicats patronaux.
Initialement conçue pour guider l’expert comptable dans sa mission spécifique de conseil auprès de ces entités, cette étude s’avère éclairante sur la pratique du syndicalisme patronal en France et ses caractéristiques.
Le contexte de l’étude
L’étude recense les réponses de 202 syndicats patronaux de tous secteurs d’activité et de toutes tailles.
L’évolution du nombre d’adhérents
Tous secteurs confondus, l’enquête démontre une répartition équilibrée de la variation du nombre d’adhérents :
- 33% des syndicats répondants observe une diminution de ce nombre,
- 35% observe une augmentation
- 33% voit ses adhérents augmenter
Cette relative stabilité entre les baisses et les hausses d’effectifs cache en réalité des disparités importantes : le secteur des assurances, par exemple, voit son nombre d’adhérents augmenter alors que ce n’est absolument pas le cas dans d’autres secteurs (transports, commerces, pharmacie).
% de syndicats répondants et variation du nombre d’adhérents
Le tableau suivant révèle l’importance du nombre d’adhérents pour le syndicat patronal comme indicateur phare. Les autres critères peuvent aussi apporter une idée des actions effectuées par l’entité, mais dans une moindre mesure.
% de syndicats répondants et critère non financier
Il est donc normal de voir que naissent différentes stratégies pour accroitre le nombre d’adhérents.
Traditionnellement porté par les élus et les dirigeants, le développement du syndicat devient un domaine à part entière : certains syndicats n’hésitent plus à faire appels à des commerciaux dont la rémunération est souvent corrélée au nombre d’adhérents nouveaux.
% de syndicats répondants et mode de développement
Les supports et les canaux de communication également se diversifient :
% de syndicats répondants et canaux de communication
Les prestations proposées
Si autrefois, l’adhésion à un syndicat patronal pouvait être « automatique » compte tenu de valeurs communes, les raisons de l’adhésion ont radicalement changé. Désormais, l’adhérent espère un retour sur investissement au moins égal à la cotisation.
92% des syndicats proposent à leurs adhérents des prestations purement administratives, tel qu’on peut le constater sur le graphique ci-dessous (service juridique et social et outils techniques). Le syndicat est également là pour offrir tous les services d’un réseau (mise en relation chefs d’entreprise, employés/employeurs).
La formation également représente une part importante des services offerts par les syndicats. Enfin, le volet aides, subventions ou garanties n’est pas une prestation phare puisque seuls 57% des syndicats proposent ce service à leurs adhérents.
Proposer à l’adhérent des services pertinents devient donc l’axe de différenciation pour le syndicat notamment s’il existe d’autres syndicats dans cette branche d’activité. Attention toutefois car certains services, proposés par des entreprises, peuvent impacter le cadre fiscal de l’entité.
% de syndicats répondants et prestations proposées
L’aspect concurrentiel
74% des syndicats sondés se disent confrontés à une concurrence. Par ailleurs, environ 50% estime que cette concurrence est en augmentation. Ces chiffres démontre bien un contexte relativement défavorable pour les syndicats qui doivent de plus en plus se démarquer.
L’étude révèle que 56% des syndicats patronaux interrogés sont en concurrence directe avec des syndicats de branche (notamment les professions libérales et les pharmacies, secteurs caractérisés par une multitude d’entités – il y a par exemple 3 syndicats de branche pour les pharmacies -)
% de syndicats répondants affectés par la concurrence des syndicats de branche
L’étude révèle que 33% des syndicats patronaux interrogés sont en concurrence avec des syndicats interprofessionnels
% de syndicats répondants affectés par la concurrence des syndicats interprofessionnels
L’étude met en lumière d’autres acteurs sur ce marché, qui peuvent se révéler concurrents indirects des syndicats patronaux : club business, entreprises privées, chambres consulaires, … de nombreuses organisations qui gravitent autour du chef d’entreprise proposent des conseils. Ainsi, la concurrence s’étend au delà du cadre syndical.
Les autres concurrents relevés par les syndicats patronaux répondants
Conclusion
L’étude démontre que le syndicalisme patronal est actuellement en pleine mutation : développer le nombre d’adhérents et repenser la stratégie est un passage obligé dans un secteur désormais très concurrencé.
Pour ce faire, les syndicats se modernisent, trouvent des canaux de développement et de communication adaptés et novateurs pour eux.
Toutefois, les syndicats doivent être informés qu’une réorganisation stratégique n’est pas toujours sans conséquence : sur le plan fiscal, le cadre peut être discuté, la non-lucrativité remise en question et les conséquences en matière de TVA et impôt importantes !
Le conseil d’un expert comptable, est alors plus que jamais indispensable.
Jeremy Lacombe, chef de mission @concertae
Contact : jeremy.lacombe@concertae.com
Etude réalisée dans le cadre d’un mémoire en vue de l’obtention du diplôme d’expertise comptable.
26 octobre 2017